Pour bien comprendre le 18 mars et la commune de Paris, il faut remonter au 4 septembre et au gouvernement de la dĂ©fense nationale. Ce jour lĂ , le bruit du dĂ©sastre de Sedan, sans ĂȘtre officiellement connu, avait transpirĂ© dans la foule. Lâagitation, dĂ©jĂ grande depuis la dĂ©claration de guerre et les premiĂšres dĂ©faites, allait toujours en augmentant.
On voyait des groupes considĂ©rables sâenfuir Ă lâapparition de quelques sergents de ville. Dans les rassemblements, personne nâosait parler Ă son voisin, et si quelquâun Ă©levait la voix pour faire entendre une parole virile, les citoyens qui lâentouraient le regardaient avec mĂ©fiance, croyant avoir Ă faire Ă un agent provocateur.
Paris voyait la police partout, et cette vision, ce cauchemar, lâhĂ©bĂ©tait, la rendait incapable de toute action commune. Ce nâĂ©tait pas lĂąchetĂ©, non certes. Le peuple de Paris a prouvĂ©, du 4 septembre au 30 mai, de quels efforts sublimes il Ă©tait capable ; il a dĂ©montrĂ©, au milieu dâune succession inouĂŻe de revers et de trahisons, que nulle tĂąche hĂ©roĂŻque ne pouvait Ă©tonner son courage.
Seulement, lâĆuvre la plus nĂ©faste du despotisme, câest de sĂ©parer les citoyens, de les isoler les uns des autres, de les amener Ă la dĂ©fiance, au mĂ©pris rĂ©ciproque. Personne nâagit plus, parce que personne nâose plus compter sur son voisin, et lâon assiste Ă ce phĂ©nomĂšne singulier quâune foule, composĂ©e dâhommes braves et prĂȘts Ă sacrifier leur vie sans marchander, se conduit avec une trop grande timiditĂ©.
Telle Ă©tait la situation des esprits, Ă Paris, le 3 septembre au soir.
Cependant, le rassemblement plus nombreux de ceux que jâavais vus, paraissait aussi plus rĂ©solu. Il prĂ©sentait ce mĂ©lange de toutes les classes et de tous les Ăąges qui annonce que la population toute entiĂšre est remuĂ©e dans ses profondeurs. On voyait des bourgeois et des ouvriers, des femmes, des enfants, des vieillards, des gardes mobiles et plusieurs gardes nationaux en uniforme.
CâĂ©tait bien Paris qui protestait, qui se soulevait. Un seul cri sortait de cette foule : La dĂ©chĂ©ance !-
Et les promeneurs nombreux sur les trottoirs, applaudissaient. Cela marcha bien jusquâĂ la hauteur du gymnase. Tout Ă coup, le rassemblement sâarrĂȘta, les cris se turent, et un mouvement violent de recul sâopĂ©ra ; puis une dĂ©bandade terrible.
CâĂ©taient les sergents de ville du poste du boulevard Bonne Nouvelle qui chargeaient. MalgrĂ© les efforts de quelques citoyens rĂ©solus, rien ne put arrĂȘter la panique.
Un garde mobile, que je nâavais pas vu dâabord, sâĂ©lança vers le thĂ©Ăątre pour y chercher refuge. Au moment oĂč il mettait le pied sur la premiĂšre marche, un homme, en bourgeois, lui tira un coup de revolver, Ă bout portant. Le jeune homme, frappĂ© en pleine poitrine, tomba Ă la renverse, les bras Ă©tendus, sans un cri.
Pas un agent ne se dĂ©tourna. Ils continuĂšrent leur chasse, et le corps resta lĂ . Lâhomme qui avait tirĂ© Ă©tait officier de paix, et cet assassinat, commis froidement, sans provocation, fut, je crois, le dernier haut- fait de lâempire.
Il finissait, comme il avait commencé, par le meurtre.
Lâutilisation de la police comme milice dâĂ©tat bourgeois pour se garantir de la contestation et prĂ©server son ordre et ses privilĂšges, nâest pas nouvelle. La crise politico-sanitaire, et Ă©conomique que nous vivons en ces annĂ©es de Macronie, orchestrĂ©e par la grande bourgeoisie et relayĂ©e sans cesse par ses mĂ©dias, est bien crĂ©Ă©e dans ce but de briser les liens sociaux.
Une de nos tĂąches, chacun dans notre environnement est de recrĂ©er et renforcer les liens. MĂȘme Ă 2 ou 3, 10, 20, ou 30, chaque groupe se doit de de faire circuler les idĂ©es, les informations, de faire lâunion autour dâune idĂ©e simple.
Faire inscrire dans la constitution le RIC en toutes matiĂšres, est le minimum requis, pour un dĂ©but de projet de progrĂšs, remettre la dĂ©mocratie aux mains du peuple, ensuite câest Ă lui de dĂ©cider de la marche de la sociĂ©tĂ©. JPM.
« En parlant de pandémie, on a sidéré les esprits ». La philosophe Barbara Stiegler invite chacun à réinventer sa mobilisation face à une démocratie qu'elle estime en péril.
(c) DâaprĂšs le livre de Arthur ARNOULD, journaliste et conseiller municipale de la Commune.
Histoire populaire et parlementaire de la Commune de Paris, Ă©ditions Respublica.
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